Dans la tradition du droit romain est vernaculaire tout ce qui est produit pour la consommation
propre, tout ce qui n’est pas destiné au marché. Ce que l’on désigne par “architecture
vernaculaire” est la construction, en milieu rural ou en périphérie de ville, de bâtiments,
sans maître d’oeuvre ni architecte (en autoconstruction), qui utilise les ressources
et les méthodes disponibles localement pour répondre aux besoins locaux.
Dans le champ de l’architecture et de son histoire, l’architecture vernaculaire a été longtemps
tenue à l’écart, dépourvue d’auteur identifié. En s’appuyant sur une solide armature
théorique qui convoque Adolf Loos, Leberecht Migge, Ivan Illich et André Gorz, cet
ouvrage part d’une critique radicale de l’architecture ordinaire et extraordinaire produite
par l’industrie globale de la construction et se propose d’examiner les circonstances dans
lesquelles, un peu partout dans le monde, émerge une alternative qu’il voit comme une
“nouvelle architecture vernaculaire”. Par son titre, il évoque un précédent parmi les
manifestes d’architecture: celui qui, en 1977, avait marqué la montée du mouvement
postmoderne, Learning from Las Vegas. Il se propose de chercher des réponses aux défis
que constituent les inégalités et la crise dramatique du logement qui affectent un tiers de
l’humanité. L’examen attentif de nombreux exemples d’architectures traditionnelles permet
de vérifier l’idée selon laquelle l’art de bâtir, particulièrement celui de bâtir des logements,
ne saurait être la prérogative d’une caste de spécialistes, encore moins celle d’une
industrie dont l’objectif principal est la maximisation du profit.
Les architectures traditionnelles révèlent une magnifique diversité, mettent en évidence
des pratiques sociales d’une immense richesse et recourent à quantité de matériaux.
Elles constituent un stock de connaissances, de maîtrises de techniques et de matériaux
qu’il serait dommage de négliger. Leur examen conduit l’auteur à s’intéresser à quelques
pratiques contemporaines spécialement remarquables et exemplaires, que ce soit dans
le domaine de la participation des usagers (Carin Smuts, Afrique du Sud), de la disponibilité
de matériaux très économiques et abondants (Simón Vélez, Colombie), de la redécouverte
et de la valorisation des savoir-faire ancestraux (Bijoy Jain, Mumbai) ou du rôle
spécifique des femmes (Hollmén-Reuter-Sandman, Finlande).